Outils de préparation mentale pour le parapente (La peur et la reprise des spirales engagées)

La préparation mentale devient une tendance incontournable dans le sport de haut niveau. Aucun athlète ambitieux ne pourra bientôt s’en dispenser. Le travail sur le mental ouvre les portes de la performance, mais, au-delà du résultat sportif, il permet aussi de progresser à son petit niveau. Las d’en entendre parler sans comprendre concrètement de quoi il s’agit, voici quelques clés pour appréhender la démarche et un aperçu de quelques techniques de « PM » les plus éprouvées, sur des cas concrets. Juste pour savoir comment cela se passe.

Par Vincent Chanderot (avec l’aide de Marine Descols et Dorthée Boudgourd) dans PM+68, Kiteboarder 125, Wind 443, Big Bike 139)

Si la technique, la science du vol ou l’endurance de certains pilotes peut impressionner, c’est surtout dans la tête que se joue le parapente. Dès l’apprentissage, la confiance dans le matériel, la capacité à vivre avec ses émotions ou l’aptitude à conserver une bonne analyse sont des paramètres déterminants pour la progression. Nombreux sont ceux auxquels la préparation mentale (la PM) n’inspire rien et on ne peut leur donner tort, tout comme à ceux qui n’envisagent pas de travailler le physique en salle de sport : le parapente peut très bien se suffire à lui-même. Vous volez, vous avez donc déjà un sacré mental et il évoluera naturellement avec la pratique et l’expérience. Un travail spécifique permet néanmoins de booster ces qualités. Apprendre à vivre avec ses émotions, dont notre sport est grand pourvoyeur, facilite la progression, repousse les limites et, c’est important, décuple le plaisir. Nous nous contenterons d’aborder ici les techniques les plus documentées (psychologie, sophrologie, autohypnose, PNL) sans évoquer celles qui tiennent plus du spirituel voire de l’ésotérique.

On a plein de bonnes raisons de ne plus pratiquer la descente en spiral engagée : en cross chaque mètre compte, ça abime la voile, on pense que notre anticipation nous évitera d’avoir à devoir descendre vite, il existe d’autres techniques certes moins efficaces mais plus douces, on ne sait plus trop faire… à moins qu’il ne s’agisse d’une petite peur qu’on préfère éviter de s’infliger… © Nova

On a plein de bonnes raisons de ne plus pratiquer la descente en spiral engagée : en cross chaque mètre compte, ça abime la voile, on pense que notre anticipation nous évitera d’avoir à devoir descendre vite, il existe d’autres techniques certes moins efficaces mais plus douces, on ne sait plus trop faire… à moins qu’il ne s’agisse d’une petite peur qu’on préfère éviter de s’infliger… © Nova

La peur inhérente aux sports aériens

Notre activité nous confronte tous les jours à des risques, dont nous avons peur à divers degrés. Ces émotions sont nécessaires à l’instinct de survie –à la conservation de marges de sécurité- mais sont des freins à la pratique et à la progression. Marine Descols, préparatrice mentale à Chambéry, fréquente les peurs au quotidien à travers son activité de coaching, notamment de base-jumpers. Elle soutient l’importance d’identifier l’origine des peurs. Sont-t-elles rattachées à une mauvaise expérience ou s’agit-t-il d’une peur imaginaire voire fantasmée ? Il n’est jamais inutile de se faire accompagner à la suite d’un accident (subi ou dont nous aurions été témoin), car le trauma, même s’il n’est pas perceptible, peut générer des pensées inhibitrices. Les peurs imaginées regroupent, quant-à-elles, les angoisses émanant de manœuvres encore inconnues (vrac ou figure), de réflexes archaïques ou de schémas moteurs inadaptés (ex : l’incapacité à réaliser un mouvement qui paraîtrait « contre-nature »). Sans oublier les peurs quasi-irrationnelles, telle que le classique « et si ce mousqueton pête » des premiers vols.

Questionnement de l’origine de ses peurs

Pour surmonter les peurs, il faut commencer par poser les bonnes questions. A soi-même, mais aussi, dans le cas des moniteurs, à ses élèves ou passagers en biplace, afin d’éviter des réponses toutes faites et inadaptées. Marine Descols suggère que l’enseignant ne doit pas projeter son univers sur celui des autres. Il risque de passer outre des peurs propres à son interlocuteur en les déniant (« cette chose ne fait pas peur »), car ce qui vaut pour l’un avec son background ne vaut probablement pas pour l’autre. Une passagère morte de trouille pourra être totalement hermétique à l’argumentation sur la solidité des suspentes si c’est la séparation d’avec ses enfants qui l’angoisse et il faudra poser des mots dessus. C’est aussi valable pour soi-même, car nous sommes tout aussi capables de nous apporter des réponses qui ne nous satisfont pas sans creuser au-delà. Seul un auto-questionnement en profondeur permet de trouver les réponses les plus pertinentes pour soi, car il n’en existe pas d’universelles. En acceptant sa peur comme un tout, on se prive de pouvoir la morceler : « Je n’aime pas les descentes en 360. Point » est une voie sans issue, tandis que la recherche de l’élément bloquant permettra d’inverser la chose en travaillant ce point.

De quoi ai-je peur ? Pour quelles raisons ai-je peur ? Qu’est-ce qui pourrait atténuer cette peur ? Pourquoi ai-je décidé de le faire quand même ?

Ce questionnement, s’il survient souvent en vol (plutôt formulé alors par un « qu’est-ce que je fous là ? ») devrait se pratiquer en amont, au calme, afin d’identifier clairement les causes et les conséquences éventuelles de l’évènement qui suscite cette peur. Si vous ne pratiquez plus la spirale engagée, tentez de savoir précisément ce qui vous gêne (la vue, le bruit, la centrifugation, l’accélération, le taux de chute, la gestion de la sortie… ?) afin de cibler la résolution du problème. Avoir la certitude de disposer des moyens d’en sortir parfaitement est une aide inestimable, aussi on peut commencer par évaluer sa technique de dissipation, de contrôle des abattées profondes, de réaction en cas de fermeture massive ou de voile noir… Dans le feu de l’action, quand la peur pointe son nez, on sollicite plutôt des techniques de respiration, on rationnalise sa pensée et on se concentre sur l’analyse pour se sortir d’une situation inconfortable. Exprimer à haute voix ce qui se passe et ce qu’on doit faire aide à tempérer ses réactions au stress. Se concentrer sur la technique permet de basculer la peur en arrière-plan. On peut encore tenter de switcher les idées négatives en faisant émerger les positives (beauté du paysage, plaisir de voler avec les copains, adrénaline, suite du vol qui sera fabuleux…).

La psychologue Dorothée Boudgourd intervient en préparation mentale auprès des athlètes de haut niveau du pôle France FFV. Elle y accompagne notamment la transition vers les nouveaux supports à foil, susceptibles de générer des appréhensions : même en haut niveau il peut y avoir de la crainte d’une maîtrise aléatoire de l’engin à haute vitesse, la peur de la chute et d’être percuté par un autre concurrent. La psychologue propose entre autres un travail sur les routines de concentration et d’activation, ainsi que sur la confiance, grâce à l’élaboration d’un discours interne sur les capacités.

Discours interne

Afin d’encourager la sortie de la zone de confort malgré les peurs et pour atteindre l’état de « flow », la coach fait émerger un discours. Un monologue à destination de soi-même, qui permet de se rassurer et de se transcender. Le flow est un état de concentration dans lequel on est totalement plongé dans ce qu’on fait, libre de toute pensée parasite, qui génère une sensation de bien-être grisante. On accède aisément au flow en vol, mais ça peut également être le cas en faisant la vaisselle. Nous nous sommes tous déjà motivés par une sorte de « Allez, go, j’y vais ! ». Le discours interne c’est un peu ça, mais en plus élaboré et plus efficace. Ce discours est toujours positif dans le fond et dans la forme, car l’inconscient ne prend pas en compte les formulations négatives. Il doit intégrer une analyse de la situation et de ses compétences, afin d’évacuer les pensées négatives pour récupérer de la sérénité. On ne se ment pas à soi-même, il faut croire vraiment en ce qu’on dit, aussi notre discours ira rechercher des souvenirs réels et valorisants. Il convoque l’expérimentation de situations semblables surmontées avec succès. « Je vais réussir parce que je sais le faire, j’y suis déjà parvenu plein de fois ». C’est à cette fin qu’il est très intéressant de tenir un carnet de vol et de progression. On peut y consigner tous les commentaires positifs des potes de vol, ainsi que toutes les bonnes sensations, les exercices ou les prouesses réalisées, afin qu’ils puissent être remobilisés plus tard. Cela permet d’emmagasiner de la confiance mais aussi de pointer des défauts, en vue d’augmenter éventuellement les marges et de verbaliser les points à travailler. Il résulte de ce travail un discours interne unique, qui nous est propre et parfaitement adapté.

Imagerie mentale ou Visualisation

Installez-vous sous portique, fermez les yeux et visualisez

Le cerveau ne ferait pas de distinction entre la visualisation mentale d’une manœuvre et son exécution. Mimer une manœuvre les yeux fermés en chaussettes dans le salon serait donc aussi utile ! Les pilotes de la patrouille de France se prêtent à cet exercice, qui permet de bien mémoriser une séquence ou une trajectoire. Selon la championne du monde de freefly Domitille Kiger, dix visualisations de saut équivaudraient en termes d’apprentissage à un vrai saut. Il existe deux visualisations complémentaires : La visualisation interne prend le point de vue du pilote (en caméra embarquée) et fait appel aux sens (vision, mais aussi kinesthésie, audition, etc) pour reproduire une gestuelle. La visualisation externe, obtenue par l’œil de l’observateur extérieur, est quant à elle toute indiquée pour la correction des placements, grâce à une visualisation de l’ensemble corps + voile. Les deux exercices peuvent être pratiqués dans la même séquence d’entraînement, par exemple en alternant deux fois chaque type de visualisation. Mais la capacité à visualiser n’est pas innée, elle a besoin d’être travaillée, car un cerveau non-entraîné se laisse aisément distraire par des pensées parasites, pour ensuite se disperser et ne jamais aboutir. Une bonne visualisation devrait paraître en HD, regorgeant de détails, de couleurs, de sons, d’émotions. Son rendu devrait sembler de plus en plus riche et vivant au fur et à mesure de la pratique : croiser des regards, des turbulences, des nuages changeants, sentir l’air glisser sur le visage, savoir où se trouve sa main et avec quelle force elle tient la commande … Exercice : On pourra commencer par des observations attentives d’une photo pendant une minute, qu’on essaiera dans la foulée de visualiser les yeux fermés à chaque fois avec plus de fidélité et de sensibilité. Par la suite, des vidéos embarquées -ou suiveuses- peuvent être utilisées comme base afin de les reproduire mentalement. Enregistrer un texte décrivant précisément une séquence est enfin une méthode très puissante afin d’obtenir une visualisation détaillée. La préparatrice mentale du Pôle France élabore avec les athlètes ce type d’enregistrements customisés. Dorothée Boudgourd nous propose un exemple de visualisation augmentée d’un discours interne très positif, dont l’objectif est d’améliorer la confiance et la compétitivité à chaque écoute. Vous pouvez vous en inspirer pour l’écriture de celui qui vous conviendra. La PM est une démarche très personnelle qui ne se satisfait pas de formules toutes faites, les solutions et techniques étant très diverses en fonction des individus.

Augmentez vos capacités de visualisation : observez attentivement cette image du lac de Garde pendant 1 minute et tentez de reproduire mentalement le maximum de détails. Recommencez. ©Icaro

Techniques de respiration et d’ancrage issues de la sophrologie

Le stress et la peur s’accompagnent d’une accélération du rythme cardiaque, c’est une préparation physiologique au reflexe animal de la fuite. Les exercices sophrologiques de respiration sont d’une efficacité redoutable pour la contenir. Le pouls baisse et le calme est recouvré grâce à la respiration « parasympathique ». Elle consiste à réaliser des expirations longues tandis que les inspirations sont plus courtes. Vous avez forcément déjà ressenti l’effet relaxant de ce souffle prolongé dans un moment de stress dû à une turbulence très forte… malgré cela, dans le feu de l’action, on se retrouve parfois dans une apnée contreproductive (à « retenir son souffle »). Elle peut nuire à la lucidité, aussi un enjeu sera de parvenir à contrôler cette respiration. Il est important d’identifier l’état dans lequel on se trouve et celui qu’on désire atteindre. Un manque de stress (un hypostress) peut aussi engendrer des réponses inadaptées (manque d’implication, de concentration, de combattivité…). Dans ce cas, la respiration « (ortho)sympathique » permet d’apporter un shoot d’agressivité, grâce à une expiration très rapide et une inspiration plus longue. Là encore vous pratiquez déjà cette respiration inconsciemment, en exhalant rapidement pour vous donner du courage (« ouf-ouf-ouf »). On peut jongler entre ces deux respirations selon la situation, par exemple pour se relaxer pendant l’approche du box, puis s’exciter quand il faut envoyer du bois, mais là encore les besoins diffèrent énormément selon les individus et leur forme du moment

Laurence Barraud, sophrologue Toulousaine suit des pilotes professionnels et observe que beaucoup respirent à l’envers, souvent en raison du stress. La respiration dite « abdominale » est celle à pratiquer en toutes circonstances. Elle consiste à inspirer en gonflant le ventre et expirer en le rentrant. Le niveau supérieur consiste à parvenir à respirer sur 3 étages, ce qui signifie pour une inspiration : gonfler le ventre / écarter les côtes / monter les clavicules. Les apnéistes que l’on voir inspirer en rentrant le ventre à l’extrême ne respirent pas… ils font de l’apnée ! Plusieurs techniques sophrologiques permettent encore d’effectuer un switch émotionnel, pour se réconforter sur ses capacités à affronter une situation stressante. Les sophrologues convoquent leur « objet neutre » (comme les marins s’accrochaient à l’amulette de leur saint-patron Christophe). Penser à cet « ancrage », ou encore réaliser un geste bien précis (et défini à l’avance, tel qu’une série de pressions de la main sur les poignées) avant d’envoyer une manœuvre permet, semble-t-il, de se projeter positivement. L’ancrage, qui peut donc être un objet, un lieu refuge, un geste, nous corrèle au souvenir d’avoir déjà réussi à franchir l’épreuve avec succès, à se croire réellement capable de la surmonter à nouveau. Certains y verront un tic ou une superstition, d’autres, comme Zidane et sa chaussette droite, y trouveront une inspiration.

Faire du cuir

Se savoir capable de réaliser quelque chose est fondamental pour y parvenir. Mais quand on ne l’a encore jamais réalisé, ça n’a rien d’évident. La préparation mentale, peut intervenir ici, mais si elle est un instrument puissant pour performer en haut niveau ou en loisir, elle ne dispense évidemment pas de la maîtrise des fondamentaux et d’une progressivité. Quoiqu’on prépare grâce à la visualisation, cela se fera toujours par étapes, décomposé dans des conditions de difficulté croissante. N’allez pas croire que de visionner et visualiser des heures de vidéos de voltige suffira à un technicien moyen pour envoyer un decro to infinit sans se mettre en grand danger. C’est toujours dans le bouillon que tout cela se construit et « Faire son cuir » reste indissociable de la pratique, du travail technique et de la connaissance du milieu. Notre cerveau, plastique, s’habitue à la peur à force d’y être exposé. Cette « homéostasie du risque » permet, avec l’expérience, de pousser plus loin l’acceptation du danger. Il convient alors de garder la tête froide et de ne jamais occulter ce risque, parce qu’à force de le gérer, on ne le perçoit plus, il devient routinier… et la routine tue. La peur ne devrait jamais disparaître et être toujours entendue. Plutôt que de la nier ou de la laisser nous submerger, on cherchera à en faire émerger une analyse froide et rationnelle de la situation. C’est ce que les coachs entendent par « vivre avec ses émotions ». On se répète souvent ce mojo : « les conditions sont fortes, ok, mais je connais ça et si c’est fort pour moi, ça l’est aussi pour les autres ». Le groupe génère une émulation qui permet de se transcender, mais aussi une pression. Ça n’est pas parce que ça passe pour eux que ce sera ok pour vous, aussi jamais on n’omettra de placer ses garde-fous. Avant de suivre des ailes aveuglément sous le vent ou de reproduire leurs manœuvres, soyez certains de connaître les niveaux et les personnalités des pilotes et tâchez de comprendre dans quoi ils vous amènent !

 Coaching et thérapies comportementales

Des thérapies cognitives comportementales brèves peuvent aider à changer les perceptions : on n’aura plus peur de ce qui ne sera plus perçu comme dangereux, par un moyen ou un autre. La technique des psychologues EMDR (Eye Motility Desensibilisation Reprogrammation), basée sur les mouvements oculaires rencontre de bons résultats pour archiver des pensées traumatisantes vécues précédemment. L’hypnose et l’autohypnose jouissent aussi d’une grande popularité pour lever des inhibitions. Une progression du mental plus rapide que les capacités techniques, risquerait-t-elle de faire basculer dans le camp des inconscients ? Selon Marine Descols, si « l’hypnose facilite l’apprentissage, il ne faudrait surtout pas se raconter la mauvaise histoire ». Cela peut être un risque avec une mauvaise utilisation de tutos débusqués sur le web. Les coach PM peuvent éviter des fausses routes, mais ils sont encore peu nombreux dans chaque discipline sportive. Les formations de PM ne sont pas homogènes et mieux vaut encore se fier au bouche-à-oreille. S’il s’agit d’hypnose, on s’adressera à un professionnel de santé formé sérieusement, car les diplômes acquis en quelques jours par des personnes sans aucune qualification préalable foisonnent sur le marché. Une rencontre constructive avec un sophrologue, un psychologue PM ou un coach permet de cibler ses besoins et d’optimiser les exercices, que ce soit pour la peur mais aussi la recherche de performance en compétition. La plupart, tels Dorothée Boudgourd ou Marine Descols prennent aussi en charge les sportifs à distance par visio. Benjamin Gaudry, préparateur mental auprès du pôle espoir FFVL met cependant en garde contre une possible addiction : le coach ne doit pas devenir un gourou. Son intervention devrait, dans la pratique amateur, pouvoir se limiter à quelques séances, le temps de transmettre au pratiquant les clés d’une PM autonome.

Vincent Chanderot est éducateur sportif BEES, 3è cycle Ufraps de l’université de Grenoble-Alpes

Marine n’a pas froid aux yeux. Wingsuiteuse, base-jumpeuse, elle peut comprendre les peurs auxquelles nous pouvons être confrontés.
Un exercice d’autohypnose :
Dépasser la peur lors d’un apprentissage sportif
Marine Descols nous offre une séquence audio à retrouver sur : https://marinedescols.com/pm/  

« Cet audio est destiné aux sportifs en plein apprentissage d’une nouvelle technique, qui rencontrent une peur réflexe limitant leur progression. L’exercice consiste à décomposer le mouvement, puis à assimiler chaque étape indépendamment, dans le but d’apprivoiser la sensation d’inconnu ».

Marine Descols, kiné de formation, est diplômée d’un DU d’hypnose médicale et préparatrice mentale à Chambéry, notamment auprès des champions de chute libre, dont elle fait partie. Elle est également la brune qu’on retrouve avec « le blond » en base jump ou en wingsuit chez Skyvibrations. Elle intervient pour le comité olympique CDOS 74 dans une des rares formations de PM ouverte à tous pouvant être financée par vos CPF.  

Un exercice de Visualisation :

Activation mentale, confiance et détermination pour reprendre la descente spirale

Voici une séance de visualisation inspirée et validée par Dorothée Boudgourd, psychologue, préparatrice mentale du pôle France FFV, intervenante au Centre de Ressources en Optimisation de la Performance et Psychologie du Sportif (Université de Lille) et Championne du monde de Voile.

Vous pouvez, si vous le désirez, vous inspirer de ce texte pour écrire le vôtre, qui s’attardera sur ce que vous avez besoin d’entendre. Faites-le enregistrer, lentement, par une voix douce et calme (ou demandez à Dorothée de s’en occuper avec vous) puis écoutez-le avant de voler, en augmentant à chaque fois le niveau de réalisme. N’hésitez jamais à passer en école pour une reprise sécurisée.

” Tu t’installes confortablement… Dans un premier temps, tu vas te concentrer sur ta respiration… sur l’air qui rentre… qui sort… tranquillement… trouver tout simplement le rythme respiratoire le plus agréable pour toi, ni trop lent… ni trop rapide… juste bon. Tranquillement, tu peux te faire un petit scan corporel et ressentir les points de contact de ton corps avec le matelas… tes pieds… tes jambes… tes fesses… ton dos… tes bras, tes bras jusqu’au bout de tes doigts… et ta tête. Tes dents sont desserrées… ta langue posée, détendue dans ta bouche… ton front est bien lisse. Si tu sens trop de mouvements derrière tes yeux, tu peux serrer fort tes paupières à trois reprises… jusqu’à ce que tes yeux s’apaisent… très très bien… 

Et maintenant tu vas imaginer… que tu es sur le déco… juste avant un vol… le vent est léger au sol mais le ciel est fumant… ça a l’air costaud en l’air, tu vois les ailes voler de façon toniques … Le soleil est déjà haut… tu le sens même sur ton visage, sur ton corps… le déco grouille de monde… il y a beaucoup d’yeux qui t’observent… tu ressens une atmosphère stressante… mais euphorique… tu vas voler… tu es heureux… ton rythme cardiaque augmente peut-être à certains moments, mais tu le régule… avec une respiration abdominale… tranquillement… les voiles se gonflent, les copains décollent déjà… certains échouent à leur première tentative… c’est technique aujourd’hui… tu restes vigilant… tu es relax, malgré ce contexte, la respiration t’aide à rester calme… tranquille… serein…tu as hâte de te mettre en l’air… hâte de donner le meilleur de toi-même, de prendre tout ce qu’il y a à prendre… Ton matériel est opérationnel, bien préparé, tu peux y aller… Tu gonfles face-voile en avançant vers elle… elle est belle… Tu te retournes… tu dois peut-être encore te recentrer un peu… il reste maintenant à charger la voile… ça, tu sais bien le faire… avec ce petit vent, tu as le temps, de choisir le bon moment pour t’arracher à la gravité… ca y est… tu es en vol… tu restes vigilant car tu connais les dangers à proximité du sol… Rapidement tu es prêt à rentrer dans le matériel… pour pouvoir être performant… pour pouvoir être précis… l’air est un peu turbulent, mais cela t’amuse… ça va secouer parfois, tu le sais… mais si c’est difficile pour toi, ça le sera tout autant pour les autres pilotes… tu les connais bien, ce sont des pilotes d’expérience… et tu es prêt à être un guerrier… à ne rien lâcher… à tout donner… à t’engager. Tu es préparé techniquement… tu sais voler même dans des conditions soutenues…tu anticipes, tu analyses tous les paramètres… tu as toutes les armes et mentalement, tu es d’attaque pour réaliser ce cross qui te fait envie… ou cette manœuvre.

Physiquement ton corps est solide… ton corps est prêt… tes gestes techniques sont affûtés… sont doux et précis… tu sais ce que tu dois faire et quand il faut le faire… il te tarde de te confronter à ton objectif. Tu commences d’abord par prendre de l’altitude… aussi pour caler tes repères… te mettre dans ton vol… être le plus précis possible… tu connais le comportement de ta voile dans ces conditions, vous avez maintenant une relation de confiance… Des copains sont à la traîne au déco, il faut les attendre… la pompe de service marche très bien, alors tu as envie de faire quelques tours de descente en 360. Tu en fais rarement mais tu sais que c’est utile de les maîtriser… Souviens-toi de ces belles spirales réalisées en stage… ça allait vite mais c’était grisant, avoue-le… Tu t’éloignes vers un box où l’air est calme… tu ressens l’adrénaline… tu respires profondément… tu fais quelques gammes avec un peu de roulis, de tangage…. Le cœur s’accélère, tu enchaînes les manœuvres… Une d’abord, puis deux… de plus en plus précises, de plus en plus amples… ton corps est bien activé… ton corps est en éveil… et ton mental est là… tes sensations sont bonnes… tu te sens bien sous ta voile… tu es heureux d’être là où tu es… tu es confiant sur ta préparation… tu as envie de faire un, deux, peut-être trois tours de spirale en enfonçant un peu la commande pour commencer… La voile face planète si tu le sens… mais tu reprends progressivement… alors ce sera peut-être pour plus tard… ça ira vite tout de même…  avec des G, tu le sais…  il va y’avoir un peu d’engagement… tu es là pour ça. Tu es chaud maintenant… tu sais que tu es prêt, tu sais faire… tous les voyants sont au vert…

Tu engages à la sellette… puis au frein… peut-être après un petit rappel pendulaire sur l’axe de roulis… tu sais ce qu’il faut faire pour que ça rentre directement et tu le fais… tu es concentré sur tes mouvements, tu y vas… c’est parti… respire… la rotation accélère, ça pousse fort, fort…tu ressens cette puissance que tu avais oubliée… tu la sens dans ton corps… mais tu es serein… tu prends de l’angle… mais tu restes serein… le sifflement aigu du vent dans les suspentes s’amplifie… tu le sens aussi sur ton visage… tes fesses, ton dos  sont écrasés dans la sellette… ca centrifuge fort mais tu restes confiant… tu sais faire… tu regardes le coin de ta voile, tu vois le sol derrière… ça tourne vite… Focus. Focus sur cette vitesse… sur cet engagement que tu ne lâche pas… jamais… à aucun moment…c’est finalement plutôt jouissif… même si ça t’impressionne… c’est une super sensation… tu es solide… tu maîtrises…la voile est robuste, tu  le sais… elle est conçue pour résister à cet exercice… elle peut faire beaucoup plus encore… l’adrénaline est forte mais tu sais que cette manœuvre te sécurise en cas d’urgence… tu sais que la voile est indestructible pendant la spirale… et tu sais parfaitement comment l‘interrompre… tu penses déjà à ta sortie… il faudra garder de la hauteur… tu sauras appliquer ce que tu as déjà fait sur d’autres descentes… tu le sais… tu décides peut-être de dissiper… ça évite la chandelle et l’abattée… tu saurais faire, mais tu as de la réserve, donc tu relèves doucement la main intérieure… tu fais un très bref contre à la sellette et à la commande… tu es déjà droit et groupé dans ta sellette…et tu te remets dans le virage… juste pour terminer la dissipation…tu respires…. … tu sais que ça passe… mais tu restes vigilant, au cas il faudrait temporiser.… et c’est déjà fini… que du bonheur… tu es fier de toi… tu maîtrises… c’est super… maintenant tu reprends ton vol tranquillement… tu revois ces bonnes sensations… tu te laisses envahir par cette euphorie… Tu es fier d’avoir repris la spirale… heureux… satisfait de cette précision d’exécution… fier de cette résistance… que tu as acquise et qui maintenant te donnera plus de sérénité… pour la suite de ton vol… et pour le prochain exercice de descente engagée. Tranquillement quand tu te sentiras prêt… tu pourras réouvrir les yeux… t’étirer si besoin… bailler si tu en as envie… et revenir… là où tu es installé… à l’instant présent. “

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